Le Glaneur

Le Glaneur

L'affaire Gallay

Jean Gallay et Valentine Mérelli


 


Jean Gallay, était un voleur qui a dérobé une énorme somme d’argent à la banque où il travaillait. La femme, Valentine Merelli, était sa maîtresse, elle qui l’a aidé à dissimuler les vols. Elle s’est enfuie avec lui au Brésil. Tous deux étaient mariés, quand ils se sont rencontrés et sont tombés amoureux l’un de l’autres.

Le couple a navigué jusqu'au coucher du soleil à bord d'un yacht de luxe, en buvant du champagne tout le temps.

Jean était un homme très instruit qui parlait allemand et anglais, en plus de son français natal. Il avait travaillé pour la police parisienne avant d’occuper un poste de commis de banque au Comptoir National d’Escompte de Paris, où il a constaté que le système de gestion des dossiers de la banque présentait des lacunes en matière d’exploitation.

En 1904, il commença à transférer de petites sommes d’argent appartenant aux clients de la banque vers d’autres comptes bancaire. Ensuite, il retire l’argent en utilisant des documents qu’il avait fabriqués. Devant la réussite de son stratagème il va augmenter de plus en plus les montants.

Il va déplacer sa famille hors de la ville, et adopter une fausse personnalité en se faisant passer pour le baron de Graval, un homme riche et célibataire vivant en ville.

D’un simple commis de banque, portant un vieux chapeau de paille et un manteau usé pendant le jour, il s’est transformé le soir en homme élégant avec un manteau à la mode, une chemise sur mesure et des boutons de manchette en platine ornés de diamants. Un haut-de-forme en soie et un monocle complètent le look aristocratique du baron.

Un soir, le baron va rencontrer Valentine Mérelli, dont il tombera éperdument amoureux.

Valentine Darbour était une jeune fille de la campagne, instruite au couvent. Elle s'est mariée jeune à un imprimeur nommé Sohet, mais s'est vite lassée de sa vie monotone et bourgeoise. Elle a donc quitté son mari, pris une partie de sa dot et s'est installée à Paris. Elle adopta le nom de scène «Valentine Merelli» et tenta de développer une carrière sur scène, mais elle n'avait aucun talent pour jouer ou chanter. Peu de temps après, quand son argent a été épuisé, elle rechercha un homme pour la soutenir - un homme riche de préférence.

Jean semblait être la réponse à la quete de Valentine. Il l'a installée dans un appartement de la rue Gustave Flaubert. Pour financer leurs séjours dans des hôtels de luxe, des repas dans les meilleurs restaurants et des voyages, il détourna des sommes toujours plus importantes de la banque.  Mais, il savait que les vols finiraient par être découverts. Ce qui fait qu’il va demander à un de ses collègues, Lerendu, de l’aider en falsifiant les livres de comptes.

Alors que l'été 1905 se déroulait, Jean savait que la découverte du détournement par Banque ne va pas tarder. Il faut que lui et sa femme quitter Paris et s’éloigner le plus possible de l’Europe. Sachant qu'ils seraient probablement pris s'ils prenaient le train, Il a donc décidé de s’enfuir avec sa maitresse à bord d’un bateau. .

Avec les 200 000 dollars restants du butin volé, ils se sont rendus au Havre, Jean a affrété un yacht à vapeur britannique, Catarina, pour une période trois mois et a embauché un équipage de 20 hommes, ainsi qu'un médecin et une femme de chambre, Marie Audot, pour Valentine.

Le 3 août, le yacht luxueux du couple est parti pour la ville côtière de Bahia au Brésil.

A Paris, la banque a finalement examiné ses livres, a découvert les fonds manquants et a lié le vol à leur employé absent. Ils ont alerté la police et leur ont fourni une photo du suspect.

Le détective chargé de l'affaire a estimé que le couple tenterait de s'échapper par bateau. Il a suivi Jean et sa maîtresse au Havre, Il a rapidement découvert le yacht loué par Jean, Il a suivi l’itinéraire du yacht et a averti la police de Bahia de la surveiller au port. Pour garantir qu'il n'y avait pas de confusion, il a fourni photo de Jean à la police brésilienne.

Jean, Valentine et Marie, seront arrêtés au bord du Catarina, à Bahia. Ils ont été extradés, vers France.

Jean a été reconnu coupable et a purgé une partie de sa peine de sept ans de prison au bagne de l’ile du diable (Guyane), située juste au nord du Brésil. «Ils me prennent loin de la France mais l'espoir de revenir encore me soutiendra», a-t-il commenté avant de partir. Il a réalisé son souhait lorsqu'il a été transféré à la prison de Melun en France. Il a été libéré en 1912 après cinq ans de prison.


      LE VOL DU COMPTOIR D'ESCOMPTE

Jean Gallay et Valantine Méréli chez le juge d’instruction

 

Cette affaire est entrée dans une phase nouvelle. Les Héros do l’équipée de Bahia ont regagné leur bonne ville de Paris où la foule leur a fait un accueil enthousiaste et narquois ; « Vive Gallay ! Vive Mèrelli » a-t-on 'crié sur leur passage... Comme quoi la popularité s’acquiert parfois sans qu'on s’en doute, et surtout sans qu’on la mérité...

L'instruction est commencée. Et le juge, M. Bourdeaux, parait, décidé à la mener rondement. C’est là dans le cabinet du juge d’instruction, qu’apparait nettement le caractère des inculpés      

Dès les premiers interrogatoires, Gallay a montré que ses moyens de défense seraient variés. Tantôt exalté et sentimental, tantôt calme et précis, il objurgue le juge de rendre la liberté à sa compagne ou bien il discute et expose les raisons qui lui ont fait commettre ses détournements.

Il plaide l'amour, l’aveuglement, la folie passagère que fait naître une passion effrénée. S'il a volé, c’est pour faire à celle qu'il aimait, une vie tissée de jours heureux. Mais lui seul est coupable..., elle est innocente... « C’est un ange, dit-il ; Relâchez-la, monsieur le juge, ou sans cela, c'est ma vie que vous prenez !... »

Tout cela n'est pas maladroit. Vrai ou faux, le système a du bon et peut réussir dans un pays où les héros d'affaires passionnelles sont généralement traités avec indulgence.

Mais les juges d’instruction sont heureusement cuirassés contre les crises de sentimentalisme. Quoi qu’il en soit, Gallay semble fort affecté.  

Tout autre est l'attitude de Valentine Méréli, insouciante, légère et minaudière, celle-ci ne prend rien au tragique. Et nouvelle Phryné, elle compte fort que le charme de sa personne impressionnera favorablement ses juges.

Quant à Marie Audo, la bonne, c’est une simple comparse dont la figure s’estompe de plus en plus, au fur et à mesure que l’action se déroule.

Les deux protagonistes sont d'ailleurs de taille à en soutenir à eux seuls l’intérêt ; et l'affaire Gallay, à coup sûr, n’a pas fini d'intéresser les nombreux amateurs de causes sensationnelles


 

     L'AFFAIRE GALLAY- MERELLI AUX ASSISES DE LA SEINE

     La lecture du verdict

La sensationnelle équipée de Jean Gallay et de Valenline Mérelli a pris fin, comme il convenait, en plein carnaval. Deux audiences ont suffi pour terminer cette affaire qui depuis plus de quatre mois, n’a pas cessé de passionner l'opinion publique.

Les grands escrocs ont, de tout temps, joui d'une sorte de prestige sur la masse. On a fait aux Parisiens un grief d'avoir accueilli Gallay et la Mérelli avec des acclamations goguenardes lors de leur retour à Paris, au mois d’octobre dernier. Cependant, cela s’explique par le côté romanesque et passionnant de l’aventure que venaient de courir le pseudo-baron et sa compagne.

Il faut dire aussi que l'information moderne s’était copieusement exercée à l'égard des passagers de la Catarina. Quand ils nous revinrent de leur lointaine croisière, nous les connaissions à merveille déjà. On nous avait dit leur passé ; nous avions contemplé leurs portraits de face, de trois quarts, de profil ; et ce fut pour la foule un plaisir de voir en chair et en os des personnages qu'elle eût crus volontiers jaillis du cerveau de quelqu'un de ses romanciers favoris.

En dépit des lenteurs de l’instruction, malgré quatre mois de prévention, l'intérêt n’a pas faibli jusqu’au bout du roman, et l’on s’est disputé les places à la cour d’assises pour ces deux audiences. L'épilogue est tel qu’on pouvait l’attendre. Valentlne Mérelli, considérée, comme ayant suivi Gallay de bonne foi et sans avoir pris part à ses escroqueries, a été acquittée. Quant à l’ancien employé du Comptoir d’Escompte, il a été condamné à sept ans de travaux forcés. Ce chiffre lui évita la déportation. Il fera si peine en France. Les juges ont trouvé qu’il avait assez voyagé.


 

 

L'AFFAIRE GALLAY,

INTERROGATOIRES ET CONFRONTATIONS

L'Escroc et sa Femme- Une émouvante Entrevue.

Comment Gallay fit la Connaissance de la Mérelli. Mme de Nader.

Quelle était la Dame blonde ?  La Question des Complices.

Il était trois heures et demie à peine, hier, quand une femme, grande, forte, vêtue de noir, comme une veuve, et portant un volumineux paquet, vint demander au garçon de bureau de M. le juge d'instruction Bourdeaux de l'introduire dans le cabinet de ce magistrat.

A ce moment, celui-ci était très occupé. Il confrontait Gallay avec la Mérelli et la bonne, Marie Audo.

Des témoins discutaient avec animation.

- M. Bourdeaux ne peut recevoir personne.

- Il me recevra cependant, répondit la mystérieuse visiteuse. Faites lui passer ma carte.

Docile, M. Pain alla frapper à la porte du magistrat. Il entra et remit la carte.

- Madame Gallay s'écria le juge. Que vient-elle faire ?

- Ma femme, fil l'escroc en pâlissant.

- Ta femme ici ? s'écria la Mérelli.

Quittant un instant son cabinet M. Bourdeaux alla vers Mme Gallay, qui attendait dans le couloir.

- Je viens voir mon mari et lui remettre ce paquet de vêtements et de provisions, Le malheureux doit en avoir besoin, fit-elle d'une voix que des sanglots, prêts à s'échapper, faisaient trembler quelque peu.

Un paquet de provisions fit le magistrat, je ne puis consentir. Madame, à ce que vous le remettiez à votre mari.

- Oh ! Ce paquet ne contient pas de poison ! reprit vivement Mme Gallay qui avait compris, au geste du juge, la crainte de celui-ci. Je ne veux pas tuer mon mari.

-Je n'en doute pas. Madame, mais mes fonctions m'obligent à la plus grande prudence. Par contre, c'est volontiers que je vais vous laisser voir votre mari.

Et M. Bourdeaux entrouvrant la porte de son cabinet invita deux gardes à amener Gallay dans le corridor intérieur.

L'entrevue de la femme abandonnée avec celui qui s’est efforcé de les déshonorer, elle et ses enfants, ne fut pas ce qu'on aurait pu croire,

Mme Gallay et son mari se tendirent la main.

- Comment vas-tu ? fit te mari.

- Bien et toi repartit la femme..

- Tu le vois. Cela ne va pas trop mal.

- Et les enfants ?

- Ils vont bien.

Sur ce, Mme Gallay vint s'asseoir sur un banc, près de l'embrasure de la fenêtre qui prend jour sur le couloir du public, Gallay prit place à côté d'elle.

Mais, à un moment, entendant entrouvrir la porte du cabinet d'instruction il craignit de voir apparaître la Mérelli et, se levant, il s'assit sur le rebord de la fenêtre. Il ne voulait pas que sa maîtresse l'aperçût trop près de sa femme.

- Je t'apportais un paquet lui dit Mme Gallay, mais le juge n'a pas voulu me permettre de te le donner. Il craignait qu'il ne contînt des alimente empoisonnés.

- Ah ! fit Gallay d'un air indifférent.

Finalement, n'y tenant plus, il dit à sa femme

- Ce lieu est mal choisi pour causer.

- Veux-tu que je vienne te voir à la prison ?

- Si tu veux. Je préférerais cela.

Avant de se retirer, Mme Gallay demanda au juge un permis de visite, qui lui fut accordé.

Demain, à l'abri des regards de la Mérelli, l'escroc pourra s'entretenir tout à son aise dans le parloir de la prison de la Santé avec celle dont il fut le mauvais génie.

A quatre heures dix, Mme Gallay quittait le Palais.

Série de Confrontations

Quand elle se fut éloignée, M. Bourdeaux put reprendre la série de ses confrontations. Le procédé du magistrat a consisté, hier, à entendre d'abord les témoins mentionnés dans les rapports de police, puis à les mettre en présence des trois inculpés.

Ceux-ci étaient assistés de Me Henri Robert, de son secrétaire, Me Dusart ; de Me André Hesse et Benjamin Landouski, secrétaire de Me Antony Aubin.

C'est par Mme Matte, dite Milady, que les confrontations ont commencé.

Mme Matte est la logeuse du 40 de la rue de Châteaudun, la maison dans laquelle Gallay et sa maitresse se sont rencontrés pour la première fois.

Avant cette entrevue, a déclaré Mme Matte, le pseudo-baron de Graval de Guerche avait eu des rendez-vous dans ma maison avec une certaine Mme de Nader. Trouvant cette femme trop exigeante, il me demanda de le mettre en relations avec une jeune fille sage. Il me promettait, pour mes bons offices, francs.

Celle qu'il désirait lui fut présentée sous les traits de Mme Mérelli.

Mais si Gallay fut trompé en la circonstance, l'entremetteuse ne le fut pas moins. Elle en est encore à attendre le prix de ses honnêtes services.

A plusieurs reprises elle s'en ouvrit même à la Mérelli.

- Je vous indemniserai, lui promit cette dernière.

Comme son amant, Valentine Sohet oublia sa promesse.

Cependant, l'aimable matrone n'a pas tenu rigueur aux deux jeunes gens de cet oubli.

Ils étaient si gentils, a-t’elle dit. Ils s'aimaient tant. C'était un plaisir de les voir s'embrasser derrière les portes.

 

Le Complice

C'était beaucoup moins cette question que cherchait à élucider le magistrat que celle du complice.

- Un individu, a-t-il demandé au témoin, n'était-il pas venu à plusieurs reprises dans la chambre louée par Gallay ?

- Si, fit Mme Matte. Un homme de vingt-cinq à trente ans s'est présenté, en effet, une première fois chez moi vers la fin du mois de juin. Il m'a prié de lui indiquer la chambre du baron. Je l'y aie conduit. Cet individu est revenu, dans la suite, plusieurs fois. Il a apporté deux machines à écrire.

Il travaillait, souvent, le soir, avec le baron. La femme de ménage m'a même fait remarquer que chaque fois il y avait du papier brûlé dans la cheminée.

Cela m'a paru louche et j'en ai parlé à un agent de la sûreté, car je suis une honnête femme. Nous n'en doutons pas, a repris M. Bourdeaux quelque peu narquois. Mais voudriez-vous nous dire si Mme Mérelli était dans la chambre quand cet individu venait travailler ?

- Jamais Mme Mérelli ne s'est rencontrée avec cet homme, répondit le témoin.

- J'affirme, s'est écriée à ce moment la maîtresse de Gallay, que j'ignorais même ces entre

- C’est parfaitement vrai, a ajouté Gallay. Mme Matte a raconté, ensuite, que ses deux clients avaient fait un petit voyage à Londres. Ils étaient partis un samedi pour revenir le dimanche soir.

C’est exact, a dit Mme Mérelli. J'ai accompagné mon ami en Angleterre. Nous sommes même descendus au Cecil-Hôtel.

 

La Concierge de la rue de Châteaudun

La concierge du numéro 40 de la rue de Châteaudun, entendue ensuite, a confirmé les déclarations de sa patronne.

Gallay venait en automobile. Elle le prenait pour un banquier très riche.

A ce moment, Mme Mérelli a demandé la parole.

- Moi aussi a-t-elle dit, j'ai cru que mon amant était riche. Mais je dois déclarer que ce n'est pas ce qui m'a poussée à l'aimer. Je l'ai aimé follement dès notre première rencontre. Avant lui, je n'avais aimé personne.

Et, ce disant, elle lançait des regards enflammés vers son ami.

Oh! laissez-moi l’embrasser implorait Gallay.

 

Le Départ pour le Havre

Avec le témoin suivant, Mme Desverger, nous abordons le récit du départ des amants pour le Havre. Mme Desverger est la concierge du pied-à-terre loué par Gallay, 24, rue François 1e C'est là que l'escroc fit envoyer tous les objets destinés au voyage. Mme Mérelli vint quelquefois voir son ami.

Enfin, le 30 juillet, Marie Audo se rendit en automobile au pied-à-terre du baron de Graval et entassa les paquets sur un omnibus de la Compagnie de l'Ouest, commandé à cet effet.

La jeune bonne a reconnu l'exactitude de ces faits.

En quittant la rue François 1e, a-t-elle dit, j'ai fait passer l'omnibus par le 10 de la rue Gustave-Flaubert pour prendre le lit de ma patronne. Ce meuble était trop grand pour entrer dans la voiture, je dus le laisser.

Les colis -il y en avait 46- furent déposés à l'hôtel Terminus et transportés de là à la consigne de la gare.

Deux autres témoins, Mme Hampre, concierge de Mme Mérelli, et le portier de l'hôtel Terminus ont confirmé ces déclarations.

Le portier a ajouté que Gallay et sa maîtresse avaient passé à l'hôtel la nuit du dimanche 30 juillet au lundi 31. Ils s'étaient fait inscrire sous le nom de comte et comtesse Reckie.

Ce n'est que le lendemain de leur départ de la rue François I, que les colis furent retirés de la consigne et chargés sur l'automobile qui emporta Gallay et Mme Mérelli vers le Havre.

 

La Femme mystérieuse

Mme Bernet, la concierge de l'immeuble habité par Gallay et sa femme, 2 bis, rue Garnier, à Neuilly-sur-Seine, devait être entendue ensuite. Elle n'a pas été touchée assez tôt par la citation du magistrat M. Bourdeaux a dû se borner à lire ses déclarations à l'agent Donzelot. Elles sont intéressantes.

C'est le 23 juillet que Mme Bernet vit pour la deuxième fois son locataire. Il lui dit Je vais rejoindre ma femme à Guiches, puis partir pour Colombo. S'il arrive des lettres durant mon absence, inutile de les faire suivre, une dame blonde, assez forte, viendra les prendre vous les lui remettrez.

Le 1e août se présenta, en effet, chez Mme Bernet une dame vêtue de noir, âgée de trente-cinq ans environ, blonde et forte. Elle réclama les lettres de Gallay, Il n'y en avail aucune.

La visiteuse revint dans la suite quatre ou cinq fois.

Le 8, le 11 et le 15 août trois lettres arrivèrent au nom de l'escroc. L'une était bordée de noir. La concierge les remit à l'envoyée de son locataire. Celle-ci revint encore le 17 août et même quelques jours plus tard puis elle ne reparut plus. Quelle était cette femme

Gallay a prétendu qu’il ignorait toute cette histoire.

Cependant la lecture de cette déposition l'avait visiblement troublé.

Je n'ai jamais tenu les propos qui me sont prêtés par Mme Bernet, a-t-il dit.

Cependant, un peu plus tard, il cherchait à se réserver « une porte de sortie » Je suis bien allé, en effet, chez ma concierge le 22 juillet, dit-il. Comme si ses souvenirs lui revenaient enfin, mais j'étais un peu gris. Je n'ai pu lui parler de cette dame en noir.

Cette personne était-elle la femme du complice de l'inculpé ? On en est persuadé. On croit également que les lettres contenant les 700.000 francs étaient destinées audit complice.

Une déclaration du docteur Kaplan, le médecin de la Catarina, semble indiquer, d'autre part, que, lorsque Gallay, avant de débarquer à Bahia, fit faire escale à son yacht à Kamoune, c'était pour expédier de l'argent à son complice. Gallay a, en effet, mis, dans ce port, une lettre à la poste. Quelle adresse portait-elle ?

 

Où reparaît le Docteur Kaplan

M.Bourdeaux aurait voulu interroger contradictoirement, sur ce point, l'inculpé avec le docteur mais celui-ci ne répondit pas à l'appel de son nom.

En entendant prononcer le nom de Kaplan, la Mérelli n'a pu s'empêcher de rire.

S'il fait ici la même tête qu'à Bahia, ça sera gai s'écria-t-elle.

Cette exclamation n'eut pas le don de dérider La question du complice le hantait visiblement.

Je vous ai dit la vérité, monsieur le juge, déclara-t-il. J'ai eu, il est vrai, un complice, mais je ne lui ai pas expédié d'argent.

D'ailleurs je n'ai pas eu à me jouer de lui. Je l'avais envoyé à Londres pour s'enquérir d'un yacht. Il a trouvé le moyen de me voler 15.000 francs. Puis il a eu le cynisme de m'écrire de lui en envoyer 10.000 autres pour mener à bien les négociations. Je ne lui ai pas répondu, Depuis, je n'ai plus eu de ses nouvelles. Cet individu a du reste, failli faire échouer toutes mes combinaisons. C'est en son nom que je devais ouvrir des comptes et faire des virements. Sa disparition, le 23 Juillet, m'a contraint à me servir du nom de ma maîtresse.

 

Rectification de Chiffres

Gallay a rectifié, à ce propos, quelques chiffres .

Le 24 juillet, a-t ’il dit, j'ai fait opérer un virement de 104.000 francs dans une succursale du Crédit Lyonnais, avenue de Villiers ; le 28 juillet, un autre de 250.000 francs à une succursale du Comptoir d'Escompte avenue Mac-Mahon, au compte de Mme Mérelli le même jour, un troisième de 366.630 francs au compte qui m'était ouvert, a la succursale A. J. de la Société générale.

Le 31 juillet, au moyen de chèques qui m'étaient fournis par ma maison, je suis allé toucher ces trois sommes à cette dernière succursale des Champs-Elysées. Il n'y avait pas assez d'argent pour me payer et on a dut aller à la caisse centrale.

Marie Audo

La bonne Marie Audo, qui jusqu'alors avait joué le rôle de personnage muet, a été enfin interrogée.

Le magistrat lui a reproché d'avoir aidé Gallay dans ses préparatifs de départ et, surtout, d'avoir consenti à changer de nom. On sait qu'en débarquant à Bahia elle déclara qu'elle était Mary Auguier.

- Je n'ai participé, ni directement, ni indirectement aux faits reprochés à M. Gallay, a-t-elle répondue.

Si j'ai changé de nom c'est à sa demande. Il m'avait dit d'abord " Mary, vous savez que je suis marié. Je ne tiens donc pas à être connu. Pour plus de sûreté, si l'on vous demande comment vous vous nommez, vous répondrez Mary Auguier ".

- Mais, a repris M. Bourdeaux, c'est dans votre valise qu’on a découvert les deux enveloppes contenant les 700.000 francs.

- C'est vrai, Gallay les y avait déposées, j'étais à son service, je n'avais qu'à m'incliner.

A la suite de cet interrogatoire, Marie Audo a été autorisée à embrasser sa sœur Joséphine.

 

Scène d'Amour

Mme Mérelli aurait bien voulu en faire autant avec Gallay. Durant toute la confrontation, elle n'avait cessé de lui envoyer, de la main, des baisers.

Gallay, de son côté, n'était pas resté insensible aux séductions de sa maîtresse. En voyant Marie Audo embrasser sa sœur, il n'y tint plus. Il s'élança vers sa compagne. Un garde s'interposa tout juste pour recevoir, aux éclats de rire des spectateurs, le baiser destiné à la belle Valentine.

Cette scène amusante a marqué la fin des confrontations.

 

Les Livres de Mme Mérelli

Mme Mérelli, avant de partir, a demandé à être autorisé à recevoir les livres suivants : les Principes de sociologie, de Spencer, les Fleurs du Mal, de Baudelaire, et De Kant a Nietszche, une étude plutôt aride.

Le magistrat lui a donné satisfaction.

Elle a réclamé, en outre, des timbres pour écrire à ses amis et du linge. Enfin, elle a insisté pour qu'on lui renvoyât de Bahia le roman qu'elle avait commencé à écrire à la prison de cette ville.

M.Bourdeaux a promis de faire les démarches nécessaires.

A revoir, mon amour,à toi toujours s'écria la Merelly, s'adressant à Gallay.

Vendredi, elle sera de nouveau interrogée.

Avant d'être reconduit à la Santé, Gallay a consenti à donner le nom de son complice, mais il a fourni une adresse incomplète du dernier domicile de cet individu.

Malgré cela, M. Bourdeaux a lancé un mandat d'amener.

Le Petit Parisien du 15 Octobre 1905

 

  • Le Petit Journal  du 22 Octobre 1905
  • Le petit Journal du 11 Mars 1906
  • La Presse du 27 Février 1906
  • Le Matin du  26 Aout 1906
  • Le Petit Parisien du 28 Février 1906

 



28/08/2019
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